Securimed tiers-payant
  • Premier Office de Tarification tiers-payant pour médecins-spécialistes et dentistes
  • Vérification de l'assurabilité des patients
  • Défense juridique contre les poursuites du SECM (Service du contrôle médical de l'INAMI)
  • Traçabilité des paiements par les OA

La règle des champs opératoires s’applique-t-elle à des interventions non remboursées par l’INAMI ?

1 juillet, 2014 by Dr R. BOURGUIGNON

QUESTION :

Je reviens vers vous pour une question de code chirurgical et de prestations esthétiques en supplément.

J’ai opéré un patient pour obstruction nasale sur déformation de cloison et déviation de pyramide nasale.

Le patient avait le souhait esthétique de voir réaligner bien droit son nez lors de cette intervention chirurgicale.

Bien souvent une levée de l’obstruction nasale peut se faire par correction de la cloison, mais le patient profite souvent de ce geste chirurgical pour avancer ses demandes esthétiques.

Evidemment ces interventions sont différentes, l’une prend 30 à 45 min et l’autre, esthétique, prend de 2h à 2h30.

Je facture le code de septorhinoplastie ouverte 258683 K300 remboursé par l’AMI et je demande, ceci est bien discuté avec le patient en pré-opératoire, un supplément esthétique (ici 900 euros) dont les 2/3 vont au chirurgien et 1/3 à l’anesthésiste.

Le service facturation m’avise qu’il a reçu un courrier de la mutualité chrétienne qui conteste ce supplément esthétique (qu’elle n’a pas à rembourser d’ailleurs).

Je vous adresse en pièce jointe ce courrier. Qu’en pensez-vous ?

Peut-on attester un supplément esthétique avec le code 258683 K300 (car ce code ne rembourse que la chirurgie à visée fonctionnelle confirmée par rhinométrie acoustique me semble-t-il) ?

Si non, faut-il dans ce cas mettre un code de septoplastie et ensuite un supplément esthétique ?

Merci de me faire part de votre expertise car le courrier de la mutuelle chrétienne est assez “virulent” et une collègue plasticienne a reçu le même courrier, concernant une chirurgie de réduction mammaire avec liposuccion demandée par la patiente, par la même mutuelle qui semble faire la chasse aux médecins…

Lettre de la mutualité :

Facturation de chirurgie esthétique.

Madame, Monsieur,

Nous constatons que sur la facture n°… de notre membre X vous facturez des « prestations de chirurgie esthétique ».

Après analyse du protocole opératoire par nos médecins conseil, nous ne pouvons marquer notre accord sur les suppléments demandés.

En effet, la prestation effectuée est liée à la chirurgie elle-même, et se trouve dans le même champ opératoire. Par conséquent la prestation doit être comprise dans l’indemnité prévue par l’AMI.

Il est bon de rappeler que c’est l’entièreté de l’intervention, y compris ses effets esthétiques, qui sont couverts par la nomenclature. Ainsi que le mentionne très justement le tribunal de première instance de Turnhout dans une affaire concernant une « Plastie de réduction d’un  sein pour hypertrophie mammaire entraînant une gêne fonctionnelle » où il n’y avait pas d’autre intervention esthétique : « il n’y a pas de base pour justifier comme honoraire non prévu à la nomenclature un composant esthétique distinct parce que le composant esthétique est déjà intégralement remboursé par l’honoraire prévu à la nomenclature. » (1)

Ce n’est pas là, le seul cas décrit par la jurisprudence en la matière, d’autres  tribunaux ont également rendu des avis similaires.

Dès lors, nous ne pouvons que conseiller à notre membre de ne pas s’acquitter du solde qui lui est réclamé. Nous assurerons  le cas échéant la défense en justice de Monsieur X .

D’après nos informations, le solde de la facture n’est pas encore acquitté, veuillez nous faire parvenir une note de crédit de 900 €.
Dans l’attente  de celle-ci, pouvez-vous bloquer la procédure de recouvrement ?

Nous vous remercions de bien vouloir nous fixer, par écrit, quant à votre position.

(1) Traduction française libre. Civ. Turnhout 6° Ch. 26/04/2011.

REPONSE :

Dans sa lettre, la mutualité invoque la règle des champs opératoires.

L’article 15 § 3 de la Nomenclature stipule en effet :

§ 3. En cas d’interventions chirurgicales multiples exécutées dans un même champ au cours d’une même séance opératoire, seule l’intervention principale est honorée.

Pour toutes les prestations chirurgicales — y compris les plâtres et les actes de la nomenclature de stomatologie accessibles aux dentistes — la règle des champs opératoires est d’application, et vous devez impérativement l’indiquer sur l’ASD via les signes /2 ou 50%.

Cette règle veut en effet que, par séance opératoire, on ne puisse attester à 100% qu’une seule prestation (en principe la plus lourde), et que les autres :

a) ne sont remboursées qu’à 50% si elles se situent dans des champs opératoires distincts ;

b) ne peuvent pas être portées en compte si elles ont lieu dans le même champ.

Le fait que la mutuelle accepte de rembourser le montant plein ne constitue pas un motif d’excuse vis-à-vis du SECM.

En stomatologie, le champ opératoire est défini comme étant le quadrant, sauf disposition contraire dans le libellé de l’acte (p.ex., pour le curetage d’ostéite alvéolaire, le champ opératoire est l’ensemble des deux maxillaires : dans ce cas particulier, il n’est pas possible d’attester un second curetage à 50% !).

En pratique, on attestera : A + B/2 + C/2.

La question qui se pose dans le cas d’espèce est de savoir si la règle des champs opératoires s’applique également à des interventions non remboursées par l’INAMI.

Cette question suppose toutefois :

a) que l’acte non remboursé parce qu’à visée esthétique constitue réellement un acte chirurgical distinct ;

b) que le patient ait expressément demandé la réalisation de cet acte distinct et ait accepté l’honoraire proposé à cet effet* ;

Il faut aussi noter que si le médecin se trouve dans les conditions où l’honoraire de la convention ne s’applique pas — ce qui ne semble pas être le cas ici —, la valeur de l’acte à visée esthétique peut plus simplement être présentée comme « supplément d’honoraires » sous réserve des règles déontologiques.

L’acte considéré est décrit comme suit dans la Nomenclature des prestations de Santé (NPS) :

258672 258683   Procédure de rhinoseptoplastie externe avec une correction complète de la cloison nasale, de la pyramide nasale et de la valve du nez sous condition d’un résultat pathologique d’une rhinométrie acoustique K 300

L’étude de la littérature médicale permet de penser que cette intervention comporte intrinsèquement une composante esthétique.

Cependant, si tel n’avait pas été le cas, la règle des champs opératoires aurait-elle été d’application ?

Nous ne le pensons pas, dans la mesure où l’ensemble des textes — comme la Nomenclature — trouvant leur base dans la loi ASSI sont d’ordre public et donc d’interprétation stricte.

Il n’est donc pas possible de raisonner par analogie et de considérer que la règle des champs opératoires de l’art. 15 § 3 de la NPS s’appliquerait à deux interventions à visée esthétique réalisées dans le même champ, puisque la matière est régie par le contrat formé entre le chirurgien et son patient (et non par la loi ASSI, puisqu’il n’y a par définition aucune intervention de l’assurance maladie-invalidité).

Le même raisonnement vaudrait également dans les cas « mixtes », à savoir un acte remboursé par l’INAMI et l’autre à visée esthétique, tous deux réalisés dans le même champ opératoire…

Nous vous recommandons par conséquent dans ce cas précis de réserver une suite favorable à la demande de la mutuelle dans la mesure où le patient ne semble pas avoir été hospitalisé en chambre privée…
__________________________
* En 2014 le médecin ne taxe en effet plus unilatéralement ses honoraires, comme dans le temps…

Ajouter un commentaire

Please note: Comment moderation is enabled and may delay your comment. There is no need to resubmit your comment.